- Lisa Otjacques
Réponse de Typhaine
En temps de confinement les repères sont effacés et la notion du temps semble brouillée. Voici la pause sur image de Typhaine A.

©Lisa Lesourd
"J'ai l'impression de flotter, le présent est en pause et le futur impossible à imaginer, ni même à tenter de traiter."
Cher/e confiné/e,
Ne voyant plus que les murs de mon minuscule appartement Montmartrois comme tout horizon depuis plus d'un mois (ou au mieux ceux de la cour intérieure qui s'élèvent haut derrière mes fenêtres), quand je ferme les yeux la nuit pour rêver, j'ai énormément de mal à visualiser des images mentales précises de situations ne serait-ce que banales. Je ne sais plus où me placer dans l’espace, ni quelle action pourrait arriver dans quel décor, comme si le monde entier s'évaporait, comme si rien de ce que j'ai pu vivre dans ma vie d'avant n'avait vraiment été.
Est-ce que ça t'arrive aussi ?
Tout s'échappe, le réel est de plus en plus trouble.
Je tente pourtant, ici et là, de rattraper ce qu'il se passe, je regarde quotidiennement les informations, pour garder pieds et comprendre, me rappeler surtout que ce n'est pas juste moi qui suis dans une phase étrange, non, des milliers d’autres âmes sont suspendues. Chaque parcelle de mes journées a un goût d'arrêt, de non-vie, et ce qu’importe comment je trouve à les occuper. J'ai l'impression de flotter, le présent est en pause et le futur impossible à imaginer, ni même à tenter de traiter. Il ne reste que le passé, je m'y perds souvent à travers mes souvenirs écrits et photographiques pour continuer de me déplacer, de voyager même si ce n’est que dans le temps. En attendant.
Heureusement il y a encore la littérature et l’écriture qui à travers leurs mots ont plus de réalité dans mon imagination que ce nouveau quotidien en points de suspension dans lequel j’ai l’impression de disparaître.
Alors, j’en viens à me demander, es-tu toi-même toujours vrai ?
Typhaine A.